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J 2 . H 10


        Le jour se fait. C’est violent, Hardy n’a pas vu la lumière depuis deux jours, depuis qu’on l’a… qu’on les a… depuis le… il soupire, incapable de formuler l’ignominie. L’opération, complète très obligeamment Laurel. 
        Lorsqu’ils retrouvent la vue, s’adaptant peu à peu à la lumière crue, c’est pour découvrir une inconnue. Encore une. Hardy n’a pas vu autant de visages différents depuis la pré-puberté. Une dame rousse, très aimable au demeurant, apparait peu à peu derrière les tissus blancs qu’elle retire de leur nez les uns après les autres. 
        Hardy se méfie. Elle est gentille, mais elle est à la solde de l’homme aux mains froides, forcément. C’est la seule explication plausible. Puisqu’à peine déballées, elle s’extasie sur leurs gueules cassées. Du beau travail, qu’elle ose affirmer droit dans son œil. Ils sont magnifiques, vous verrez, vous serez contente, c’est ça ma grosse, vas-y rajoutes-en, comme si j’allais te croire. 
        Qui pense-t-elle leurrer ? Hardy ne se voit pas de face, ce qui lui évite probablement la syncope, mais il aperçoit du coin de l’œil tout un tas de petits fils drus et bleus dressés en cercle autour de son nez. Des fils qui n’ont rien à faire là. Il en pleurerait. D’ailleurs, même Laurel et son calme de moine bouddhiste accusent le choc, Hardy l’entend retenir son souffle. Et oui. Il l’entend, maintenant. Il ne le sent plus. C’est là, plus ou moins, qu’il réalise vraiment. Mais vraiment, genre définitif, plus d’échappatoire, voie sans issue. Elle l’a amputé. C’est fini. C’est trop tard.
        Autant le dire, il encaisse mal. Il n’a pas le choix, ne l’a jamais eu et encore une fois, il n’a plus qu’à dire Amen. Ainsi soit-il. Il rend son tablier. Par les balafres suintantes que nettoie délicatement la rousse mythomane, il sent s’enfuir toute volonté, toute envie, toute joie de vivre. Sa bonne nature se fait la malle avec sa peau.
        L’absence de sensation ne l’aide pas non plus. Amère constatation, il voit la rouquine nettoyer, tamponner, mais il ne sent rien. Là-dessous, tout le monde est dans les vapes. Mort ? Allez savoir. Et d’ailleurs, comment peut-il souffrir à ce point s’il ne sent rien ?
        Subitement, un récit lui revient en mémoire. Quelques années plus tôt, suite à une séance de corde à sauter sans cage adaptée particulièrement irresponsable, la direction cérébrale les a forcés, Laurel et lui, à suivre une thérapie de groupe pour « surmonter le traumatisme ». Inutile de dire qu’Hardy a protesté, en vain. 
        Et vraiment, sur le coup, ça ne paraissait pas avoir d’importance. Il avait ricané. S’était peut-être moqué, juste un peu, parce que quand même, elles leur avaient fait un de ces cinéma… Bref, en tous cas, il se souvient, les gencives étaient là suite à un arrachage un peu violent. 
De la gnognotte, Hardy maintient. On les avait privées de deux dents de sagesse parfaitement inutiles alors que lui, on lui a amputé… non, il refuse d’y penser. Bref. Les gencives ont parlé d’anesthésie et elles ont dit qu’après, durant des heures, elles ne sentaient rien. 
        Alors, il se dit… peut-être que personne n’est mort, après tout ? Peut-être que quand l’anesthésie sera entièrement dissipée, il… ça fait deux jours, l’interrompt Laurel. Il n’y a plus d’anesthésie.
        La rouquine découpe des tissus blancs. Hardy frémit et en oublie ses histoires d’anesthésie. Elle ne va pas les enfermer à nouveau, hein ? La douleur est un tout petit peu moins vive maintenant qu’ils sont dehors, elle n’oserait pas… Si. Les tissus blancs s’approchent, s’entassent, l’obscurité se fait et c’est qu’elle appuie, cette cruche ! La cage se réajuste, écrase plaies et coutures. Hardy ne crie même pas.  
        Peu importe que tout le monde soit mort ou pas, finalement. Dans un brouillard de souffrance, il rend les armes. Il n’a plus de force. Il soupire, sans savoir s’il soupire vraiment ou s’il pense qu’il soupire. A partir de maintenant, sa vie ne sera plus qu’une longue attente de la mort. Il ne donnera plus rien. Qu’ils se débattent sans lui, il n’a plus le courage. Il est fini.
        L’avantage, lâche Laurel dans un souffle, c’est que ça pourrait difficilement aller plus mal.

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