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Cette fois, sa décision est prise. Elle ne le fait pas pour Cassie, encore qu’elle lui doive sans doute des excuses. Ou pas ? Elle a certes été dure, mais ce qu’elle a subi ne serait jamais arrivé sans Cassie, alors… Maryann redresse le menton et rajuste sa perruque. Elle verra ça plus tard. De toute façon, le mal est fait des deux côtés. Peut-être vaut-il mieux pour tout le monde avancer sur des voies séparées. D’ici quelques semaines, lorsqu’elle aura les idées plus claires, elle réévaluera la question, mais dans l’immédiat, elle a mieux à faire.
Alors non, elle ne le fait pas pour Cassie, elle le fait pour elle. Pourtant lorsque Cassie est passée à la galerie quelques semaines plus tôt, couvertes de bleus et de coupures, pour lui annoncer tout à trac qu’un homme avait manipulé ses pensées, Maryann a éclaté de rire. Jaune, oui, mais de rire quand même. Elle avait beau savoir, au fond, que quelque chose clochait dans sa rancœur, tout ça était trop… dingue. Oui, dingue, c’est le mot, totalement insensé, pas crédible un instant, un délire de plus sorti du cerveau de Cassie Willis.
Elle a honte, maintenant. Cassie a été honnête de bout en bout, cette fois, alors même que Maryann lui riait au nez. Elle est sortie de la galerie la tête haute, avec un sourire las, boitant légèrement. Le beau brun qui ne la quitte plus l’attendait dehors.
Et puis l’idée a fait son chemin, presque, même, à l’insu de Maryann. Des bribes de sensations, une impression d’étrangeté, un malaise, l’impossibilité de justifier ses propres réactions. La vision du cd en miettes dans un tiroir du bureau. Et la disparition soudaine des migraines, surtout, ces migraines ayant débuté exactement dans la période avancée par Cassie, qui n’en avait pourtant pas connaissance.
Elle soupire, repoussant résolument sa culpabilité. Elle n’avait aucun moyen de lutter. Et ce jour où Cassie est venue, lui proposant pour conclure de « faire le ménage dans son esprit », l’esprit en question était sans doute encore trop encombré. Sa défiance envers Cassie l’a forcée à refuser, et ensuite… l’offre de Cassie tenait toujours, oui, mais Maryann est fière, trop sans doute, et n’a pas eu le courage de faire marche arrière. Alors elle attend. Elle attend que l’équilibre revienne de lui-même, et surtout, elle surveille.
Avec un mouvement impatient des atroces chaussons en plastique qu’elle s’est obligée à porter, Maryann pose un œil dur sur la façade de l’hôpital. Elle surveille. Ils ignorent, tous, le métier qu’elle exerçait avant d’être galeriste, celui que sa sœur exerce toujours. Les nuits de garde, les patients difficiles, le décor morose. L’absence totale de créativité. Et les contacts qu’elle a conservés, parce que contrairement à ce que peut en penser la clique de Cassie Willis, Maryann est fidèle en amitié.
Elle rajuste sa blouse verte et chausse d’épaisses lunettes à monture noire. Oh, oui, ce premier métier l’a durcie, c’est sûr. Maryann ne sacralise ni la mort ni la vie, et ce qu’elle s’apprête à faire ne lui pose aucun problème, bien au contraire. Il lui semble même que son geste s’inscrit dans une sorte d’ordre naturel. Personne n’entre dans sa tête. Personne ne manipule ses pensées. Et celui qui le fait ne doit pas s’attendre à une seconde chance. Elle effleure d’un doigt la seringue et le flacon au fond de sa poche, redresse le badge de plastique sur sa poitrine et se dirige d’un pas ferme vers l’entrée du personnel. Il ne se réveillera pas. De ça, Maryann Batcher s’en porte garante.
Alors non, elle ne le fait pas pour Cassie, elle le fait pour elle. Pourtant lorsque Cassie est passée à la galerie quelques semaines plus tôt, couvertes de bleus et de coupures, pour lui annoncer tout à trac qu’un homme avait manipulé ses pensées, Maryann a éclaté de rire. Jaune, oui, mais de rire quand même. Elle avait beau savoir, au fond, que quelque chose clochait dans sa rancœur, tout ça était trop… dingue. Oui, dingue, c’est le mot, totalement insensé, pas crédible un instant, un délire de plus sorti du cerveau de Cassie Willis.
Elle a honte, maintenant. Cassie a été honnête de bout en bout, cette fois, alors même que Maryann lui riait au nez. Elle est sortie de la galerie la tête haute, avec un sourire las, boitant légèrement. Le beau brun qui ne la quitte plus l’attendait dehors.
Et puis l’idée a fait son chemin, presque, même, à l’insu de Maryann. Des bribes de sensations, une impression d’étrangeté, un malaise, l’impossibilité de justifier ses propres réactions. La vision du cd en miettes dans un tiroir du bureau. Et la disparition soudaine des migraines, surtout, ces migraines ayant débuté exactement dans la période avancée par Cassie, qui n’en avait pourtant pas connaissance.
Elle soupire, repoussant résolument sa culpabilité. Elle n’avait aucun moyen de lutter. Et ce jour où Cassie est venue, lui proposant pour conclure de « faire le ménage dans son esprit », l’esprit en question était sans doute encore trop encombré. Sa défiance envers Cassie l’a forcée à refuser, et ensuite… l’offre de Cassie tenait toujours, oui, mais Maryann est fière, trop sans doute, et n’a pas eu le courage de faire marche arrière. Alors elle attend. Elle attend que l’équilibre revienne de lui-même, et surtout, elle surveille.
Avec un mouvement impatient des atroces chaussons en plastique qu’elle s’est obligée à porter, Maryann pose un œil dur sur la façade de l’hôpital. Elle surveille. Ils ignorent, tous, le métier qu’elle exerçait avant d’être galeriste, celui que sa sœur exerce toujours. Les nuits de garde, les patients difficiles, le décor morose. L’absence totale de créativité. Et les contacts qu’elle a conservés, parce que contrairement à ce que peut en penser la clique de Cassie Willis, Maryann est fidèle en amitié.
Elle rajuste sa blouse verte et chausse d’épaisses lunettes à monture noire. Oh, oui, ce premier métier l’a durcie, c’est sûr. Maryann ne sacralise ni la mort ni la vie, et ce qu’elle s’apprête à faire ne lui pose aucun problème, bien au contraire. Il lui semble même que son geste s’inscrit dans une sorte d’ordre naturel. Personne n’entre dans sa tête. Personne ne manipule ses pensées. Et celui qui le fait ne doit pas s’attendre à une seconde chance. Elle effleure d’un doigt la seringue et le flacon au fond de sa poche, redresse le badge de plastique sur sa poitrine et se dirige d’un pas ferme vers l’entrée du personnel. Il ne se réveillera pas. De ça, Maryann Batcher s’en porte garante.