Cher Lecteur/trice, parlons peu, parlons poisse. Tu sais, celle qui colle aux semelles comme de la bouse fraîche, qui te pousse à marcher sur ton lacet ou à plonger le doigt dans du caramel bouillant. Aurais-tu, toi, la moindre piste quant au pourquoi du comment certains traversent l’existence sans jamais se prendre un pied dans l’autre, alors que d’autres semblent développer une obsession pour les étreintes passionnées avec le sol, quelle que soit sa texture ? Alors voilà. Etant moi-même du genre à rouler des patins aux baies vitrées, je me suis interrogée, tu comprends. Et puisque je suis du genre à faire des listes, pour me prouver que finalement tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, j’ai réitéré l’expérience. Je te préviens tout de suite, ça n’a ni queue ni tête. La poisse au citron, celle qui pique une seconde. Symptôme Résumons donc la poisse au citron par son plus fidèle serviteur : l’étron bien frais oublié juste pour toi par un généreux propriétaire d’usine à crottes. Oui, j’adore les chiens. Un peu moins leurs patrons qui préfèrent me voir repeindre le trottoir d’ocre roux plutôt que d’effleurer d’un doigt ganté la production fécale de leur adorable toutou. Degré de gravité Que celui ou celle qui ne l’a jamais testée me jette la première pierre. La poisse au citron est la plus commune des poisses, du genre très agaçante, mais en rien traumatisante. Du genre que tu lui mettrais bien une tarte, la maintenant tout de suite, voire une tarte meringuée pour oser t’égratigner l’amour-propre, mais que tu oublies au premier morceau de chocolat qui passe. La poisse au melon, celle qui dégouline sur le menton. Symptôme La poisse au melon est la compagne de lit de la poisse au citron, sauf que c’est la femelle dominante. Celle où tu as bien piétiné l’étron, mais sans t’en rendre compte avant que quelqu’un dans l’ascenseur ne demande « mais c’est quoi cette odeur ?? » en louchant sur tes semelles repeintes d’un air dégoûté, comme si ça ne lui était jamais arrivé, à ce c***, de marcher dans la fiente. Degré de gravité Celle-là, c’est celle que tu voudrais vraiment beaucoup oublier dans la seconde, mais qui a tendance à s’attarder sur ton menton. Il s’agit là du second stade de la poisse. Du genre que tu as beau te frotter le menton avec insistance, impossible d’oublier l’outrage sans une tablette de chocolat entière, rapport aux particules fécales incrustées dans tes semelles. Et dans le tapis de l’ascenseur. La poisse au vison, celle qui glisse. Symptôme Tu es forte, tu es brave, tu es sauvage, tu vas aider à rentrer le bois familial avec l’élégance d’un Charles Ingalls après les épinards. Tu enfiles les bottes et le ciré, mais tu oublies de regarder où tu vas pour te retrouver face contre terre dans la tranchée boueuse avant même d’avoir ramassé la moindre bûche. Degré de gravité Mieux vaut que ça glisse plutôt que ça colle, hein. La poisse au vison n’est que le niveau supérieur de la poisse au melon, quand tu atteints un certain stade de détachement, te permettant de laisser couler l’affront par un simple verre d’Oasis. Ceci dit, ce stade de détachement est atteint beaucoup plus facilement sans témoin. La poisse au zircon, celle qui brille de mille feux. Symptôme Une chute banale, c’est de la poisse au citron. Une chute devant témoin, de la poisse au melon. Une chute devant témoin masculin à la sortie du lycée qui te laisse avec la lèvre en patate coincée dans l’appareil dentaire durant vingt minutes, postillonnant sur tous ceux qui viennent s’enquérir de ton état, ça, c’est de la bonne poisse au zircon. Degré de gravité La poisse au zircon n’a rien de grave. Là où elle est fourbe, c’est qu’elle est bien visible, avec une vicieuse tendance à laisser des preuves de son passage. Du genre que tu as beau la polir au cirage, ton ego en ressort avec la tête de Rocky après la baston, et tu as beau te dire que Stallone emballait tout ce qui bouge, tu as du mal à t’auto-croire, avec ta lèvre en patate. La poisse au grillon, celle qui croque sous la dent. Symptôme. Laisse-moi te narrer un exemple d’une banalité affligeante. Tu raccroches ton téléphone, tu es hystérique tendance Speedy Gonzales, tu envoies fissa un texto à ta BFF pour lui dire que ça y eeeeeeeeesssssstttt IL t’a enfin invitée au resto OMG LOL ravalement de façade, trop ouf tu vas mourir. Quand tu vois « envoyé », tu comprends que tu t’es trompée de numéro, qu’IL vient de recevoir ton texto et que tu vas vraiment mourir. Degré de gravité La poisse au grillon, c’est comme une salade d’insectes mal lavée. Elle a un goût bizarre, elle croque sous la dent et tu retrouves encore un morceau de patte coincé dans ta prémolaire trois heures plus tard. Voire trois ans. En gros, une fois que tu comprends que non, malheureusement, tu ne vas pas mourir, c’est marche ou crève. Le bon équilibre, dans le cas de figure présent, consistant à hurler whyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyy god whyyyyyyyyyyyyyyyy avant de fracasser ton téléphone sur le mur et d’aller dîner comme si de rien n’était. La poisse au goudron, celle qui englue. Symptôme Tu as un poste intéressant, des responsabilités, et tu n’es même pas ridicule. Ton amour-propre fait la danse de la joie à chaque fois que tu passes devant ton patron, jusqu’à ce jour où tu traverses la salle de réunion en revenant des toilettes pour te rendre compte une fois ton bureau atteint que ta jupe est coincée dans ton collant et que tu viens de montrer ton c** à ton patron, au comptable et la moitié des fournisseurs. Degré de gravité Je ne te cache pas que la poisse au goudron colle à la peau comme un legging trop petit. Je ne te cache pas non plus que tu auras probablement envie de fusionner avec le tapis, voire de te laisser mourir de faim dans ton bureau pour ne plus jamais croiser les témoins de l’affaire. Je ne peux que te conseiller un triple Mojito avec supplément de cacahuètes. La poisse au Reblochon, celle qui fouette de la croûte.
Symptôme Tu visualises un morceau de Reblochon oublié sur la table de la cuisine ? Pareil. La poisse du même nom te colle à la peau, comme quand tu te viandes sur les pavés de la cour d’école, et quand je dis école, je parle 20 ans, pas 10, pour te retrouver la jupe par-dessus la tête sans pouvoir te relever parce que ton sac à dos est trop lourd, exposant ta cellulite à l’intégralité de tes camarades de promo. Degré de gravité La poisse au Reblochon a ça de bon qu’elle t’offre des anecdotes qui font beaucoup rire. Les autres. Elle a aussi ça de bon qu’elle t’apprend, à la longue, le sens de l’autodérision et un certain lâcher-prise sur la vie, si tu ne veux pas te suicider du haut des pavés. En revanche, je t’avoue que même après des années de vie commune, tu lui mettrais bien la raclée de sa vie, à cette garce de f*** de m***, histoire de lui apprendre à ne jamais aller voir ailleurs.
6 Commentaires
Mamzette
16/1/2015 07:54:52
A ton service :)
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17/1/2015 02:25:19
énoooorme! si j'ai bien compris, ce profil de Pierre Richard est hautement autobiographique??? T'inquiète, je ne suis pas en reste avec ce genre de poisse, mais bon, je tente de faire un thérapie pour oublier... J'adore la métaphore de la poisse au Reblochon, celle qui fouette de la croûte, je ne m'en remet pas. Allez, fais-gaffe en sortant, il y a certainement une peau de banane à éviter...
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Mamzette
17/1/2015 06:47:01
A mon grand regret, chaque symptôme fut expérimenté dans la douleur par moi-même. Mon deuxième nom, c'est Pierrette. Et je continue jour après jour à tenter le diable en buvant mon thé au-dessus de mon clavier, c'est dire si je suis ouf...
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Mamzette
17/1/2015 06:50:37
En fait d'inspiration, tout est véridique... mais merci, parce que tant qu'à collectionner les poisses monumentales, autant que ça serve à quelque chose. Alors si ça peut faire rire, hein... moi je dis vas-y, envoie la suivante, même pas mal.
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