Cher Lecteur/trice, des fois que tu n’aurais pas remarqué, le gros bonhomme rouge est dans les startings blocks. Les lutins ont presque fini d’astiquer le traîneau, les rennes sont au régime sec et les cartes Michelin ont enfin cédé la place à un GPS qui signale les radars, autant te dire que cette année, Papy est décidé à ne pas se faire flasher. Et au milieu de tout ce petit monde, on trouve quoi ? La télé. Et les films de Noël. Un marathon de navets difficilement enjolivés à coups de guirlandes et de bonhommes de neige prenant possession du petit écran tous les après-midi de décembre, et qui en dépit de leur réputation méritée, contribuent à donner un je-ne-sais-quoi festif à tes dimanches après-midi pré-Noël. Ou à faire baisser ton QI, c’est selon, mais qu'est-ce-que c'est bon. 1. Parce que c’est crédible. En un seul dimanche, tu peux voir dix-huit couples brushingués au sourire ultra-brite se former sous les flocons de neige, un quart d’entre eux aidés par le père Noël, un autre quart par des lutins espiègles, le reste par une branche de gui bien placée/un labrador amical/un moteur récalcitrant. Ne jamais sous-estimer le pouvoir d’un chien ou d'un moteur.
2. Parce que c’est moderne. Tu te dis que le film ne s’en sort pas trop mal pour un navet des années 90, jusqu’à voir jaillir un smartphone de sous un pull jacquard. Et je parle bien d’un smartphone dernier cri, pas d’un Nokia tribandes assorti au pantalon en velours du protagoniste. 3. Parce que c’est joli. Le décor en carton-pâte est planqué sous huit tonnes de neige et trente-deux kilomètres de guirlandes lumineuses, les maisons sont toutes en bois rouge et les sapins bien alignés. C’est toute la magie de Noël : la pire des niches se transforme en palais illuminé, sauf la tienne. 4. Parce que ça fait réfléchir. Quand tu sors fermer les volets, tu penses enfin à lever le nez vers les étoiles, des fois que les rennes passeraient dans le coin. Mieux, tu prépares une double dose de vin chaud au cas où le père Noël s’inviterait. S’il ne vient et que tu descends la double dose en solo, soyons lucides, c’est la faute du film. 5. Parce que c’est fashion. Chez les hommes, tu as le choix entre le bûcheron et l’homme d’affaires : moonboots et chapka à oreillettes avec abdos sculptés par le maniement de la hache d’un côté, costume trois pièces et attaché case avec mocassins antidérapants de l’autre. Chez les femmes, tu as la bombasse en robe moulante, brushing imperméable et talons de douze sur le verglas, ou l’ingénue en jupette patineuse ras le string à pompon et pull de Noël sous des nattes bien sages. De quoi donner une bonne leçon aux clichés. 6. Parce que c’est féministe. Quand monsieur porte un duffle coat et trois écharpes, madame se promène jambes nues dans ses escarpins, c’est dire comme elle est libre. Quand monsieur patine façon hockeyeur professionnel, madame vacille sur ses graciles gambettes en lui agrippant désespérément le bras, c’est dire si elle n’a rien à prouver. Et quand monsieur hausse un sourcil, madame se liquéfie devant la cheminée, ce dans les dix-huit films sans exception, c’est dire si elle est à l’aise avec ses sensations. 7. Parce que c’est qualitatif. On parle de jeu d’acteurs, du vrai, de déclarations d’amour sur le ton de « fichtre, j’ai oublié d’acheter du pain », ou du deuil dramatique façon « sacrebleu, j’ai crevé un pneu ». Ce n’est pas pour rien que les boulangeries cartonnent à Noël. 8. Parce que c’est représentatif. D’une, le film de Noël n’existe pas sans histoire d’amour. Le célibataire est une âme perdue pendant les fêtes, il est totalement inconcevable, voire anti-Noël, qu’il/elle assume son statut à l’heure du gui. De deux, les héros/héroïnes ressemblent au commun des mortels comme un sac Hermès à un sac poubelle, et ça, ça booste quand même bigrement la confiance en soi. 9. Parce que c’est musical. Ces perles de l’industrie cinématographique ont mis le paquet sur la recherche musicale, et rivalisent d’imagination pour réinterpréter Mon beau sapin version rumba, Jingle bells version métal ou Santa’s coming to town en reggae, pour les plus audacieux. Les autres misent sur le courant avant-gardiste des chœurs joyeux et des violons mielleux avec clochettes tintinnabulantes. Badass. 10. Parce que ça marche. Oui, tu perds deux ou trois neurones et sans doute ton temps, mais si tu laisses défiler les films de Noël en fond sonore* suffisamment longtemps, tu rêves en rouge et vert même dans les alertes pollution à l’heure de pointe. Un peu de magie dans le quotidien et des senteurs de sapin jusque dans le local poubelle, ça vaut bien quelques neurones. *Le film de Noël se vit en fond sonore, et uniquement en fond sonore. Il est conseillé de faire ses comptes, la cuisine ou le ménage en parallèle, afin de garder un orteil en prise avec la réalité. Ne s'adonner à aucune autre activité simultanée peut entraîner une baisse dramatique de quotient intellectuel, une addiction aux boules et aux guirlandes ou une obsession maladive pour les costumes rouges. L’industrie cinématographique ne pourra être tenue responsable d’une consommation excessive et/ou irraisonnée de bluettes sous les flocons.
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Mars 2018
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